Qui décide vraiment?

La lecture d’un best-seller – d’un auteur suisse de surcroît – sur la thématique de la clairvoyance est un rappel de plus que dans nos prises de décision quotidiennes sur des sujets importants (et moins importants), nous sommes influencés par des biais que nous ignorons mais qui exercent un pouvoir majeur. On sait par exemple qu’il y a une corrélation statistiquement significative entre la couleur des yeux de notre partenaire amoureux et celle de notre parent du sexe opposé (si nous sommes hétérosexuel). Nous avons l’impression de prendre une décision librement, mais le libre arbitre n’existe pas.

Cette constatation est évidemment particulièrement importante dans le monde du recrutement car elle nous fait réaliser que nous devons être très attentifs aux influences inconscientes sur le choix des candidats que nous sélectionnons. Observons avec attention les résultats d’une campagne de recrutement gérée via un logiciel d’intelligence artificielle qu’Unilever a mondialisé l’année passée, et en particulier le résultat suivant: Unilever a noté une nette augmentation de recrutement d’employés issus de la diversité. On ne peut que se résoudre à admettre que, qui que nous soyons, nous portons en nous des biais cognitifs, qu’on peut définir comme l’ensemble des fonctions de l’esprit liées à la connaissance (perception, langage, mémoire, raisonnement, décision, mouvement). Et que seules des approches neutres comme l’intelligence artificielle peuvent les contrecarrer.

L’objectif ici n’est pas de citer tous les biais, il en existe des dizaines. La question est plutôt: devrions-nous, en supposant cela possible, totalement réprimer nos biais cognitifs? Sont-ils un obstacle à éviter coûte que coûte pour arriver à une vérité? Eh bien je ne pense pas!

Les biais ont aussi une fonction utilitaire que l’on retrouve dans le processus de recrutement: ils permettent de contourner certains obstacles (le temps en est un majeur), ils permettent de ne pas s’encombrer l’esprit (efficacité), d’aller directement à la conclusion. C’est un mécanisme de survie. Quand nous étions chasseurs-cueilleurs, nous n’avions pas le temps d’analyser si cette forme brune et mouvante était un ours ou une biche: il fallait prendre une décision. L’ADN de ceux qui ont pris la mauvaise décision a disparu, ne reste présent dans nos gènes que celui des hommes et femmes qui ont pris leurs jambes à leur cou sans analyse préalable.

Si nous pouvons d’une part prendre conscience de certains biais, lutter contre des tendances innées mais injustifiables (genre, âge, race, etc.), nous pouvons d’autre part utiliser ce que nous ressentons comme outil pour trouver des personnes avec des valeurs, une attitude, un engagement les plus proches possibles de ce que nous, ou notre client, recherchons. En d’autres termes, ce n’est pas parce que j’épouse une femme avec la même couleur d’yeux que ceux de ma mère que le mariage est voué à l’échec.

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