Responsables RH, les oubliés de la santé au travail?

Les personnes en charge des ressources humaines sont des acteurs très importants, tant sur le plan du fonctionnement de l’entreprise que sur celui des conditions de travail et de la santé des employés. La plupart sont très motivés par leur métier, choisi pour sa dimension humaine et sociale, mais ils sont soumis à des contraintes parfois contradictoires entre les demandes de la direction et celles des employés, qui peuvent impacter leur santé.

Ainsi, une enquête réalisée en 2020 par les Éditions Tissot auprès de 810 professionnels RH a mis en évidence la complexification de leurs nombreuses tâches administratives et l’impact psychique des relations parfois difficiles avec les employés. Une grande majorité s’est déclarée épuisée, frustrée et isolée, se sentant souvent proche du burnout. L’enquête «Professionnels RH, comment allez-vous?», menée en octobre 2021 en France, a confirmé ces résultats révélateurs de leur mal-être: durant la crise, bon nombre d’entre eux se sont sentis livrés à eux-mêmes, non reconnus et non soutenus. D’où une déconnexion progressive de la vie de l’entreprise, une perte de sens de leur travail une diminution de leur motivation… Conséquence: la moitié des personnes interrogées cherche à changer de travail ou l’envisage.

Des enquêtes similaires ont-elles eu lieu en Suisse? Pas à ma connaissance… La situation y serait-elle donc meilleure? Voici ce qu’écrivait en 2013 Stéphane Haefliger, référence incontestée dans le monde des RH: «Jusqu’ici, pour beaucoup, nous étions les pompiers de l’organisation. Nous risquons désormais d’en devenir les pompistes.» Et plus récemment, il constatait que «le processus de recrutement est dans un état de déliquescence avancé.» Les RH, dans l’ensemble, ne semblent pas avoir les moyens de jouer vraiment leur rôle crucial au sein des entreprises.

Alors, quelles pistes d’évolution envisager? De toute évidence, la première étape doit consister à favoriser une meilleure prise de conscience de l’importance des problèmes (y compris ceux émergeant du télétravail – avec une explosion du contrôle des employés – et d’autres méthodes de gestion obsolètes) par tous les acteurs concernés: associations professionnelles RH, professionnels de la Santé au Travail, partenaires sociaux, responsables politiques…

Deuxième étape: s’il y a émergence d’une meilleure visibilité des RH (voir le dossier récent de PME Magazine), il faut continuer à mettre en évidence leur rôle déterminant pour construire et renforcer la culture d’entreprise. Celle-ci doit définir clairement les valeurs donnant du sens au travail: confiance, respect, solidarité, autonomie etc. car l’organisation du travail s’appuie sur elles. Et sur ce socle peut se développer une entreprise saine et performante sur les plans économique, humain et social (RSE).

Les RH sont l’interface direction-employés. Leur défi: veiller à ne pas laisser certaines «valeurs» individuelles (argent, pouvoir etc.) prendre le dessus sur les valeurs «élevées» de la culture d’entreprise. De même, le défi pour la direction: respecter cette culture-socle en éliminant certains écarts (désinformation, pression sur le personnel etc.).

La troisième étape se situe au niveau des structures de Santé au Travail (internes ou externes) qui doivent veiller à ce que les problèmes spécifiques aux RH soient bien identifiés et pris en compte. Permettre qu’ils bénéficient de structures de soutien tel, en France, l’Observatoire Amarok pour les dirigeants de PME et les indépendants, ou tels les échanges entre pairs, les clubs privés etc., pour que leur «bonne santé globale» (physique, psychique, sociale et « spirituelle ») ne soit plus…. oubliée!

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