L’expression «quiet quitting» est apparue il y a un peu moins d’une année aux États-Unis, sur TikTok et a généré (selon un article de l’Express), une avalanche de témoignages et de réactions sur les réseaux sociaux, en relation avec un choix de vie professionnelle de plus en plus en vogue. En français, on parle de «démission silencieuse», dans le sens où l’employé ne fait que le strict nécessaire de ce pour quoi il est payé.
Dans ce même article, selon les résultats d’une enquête menée en déc. 2022 par l’entreprise française de sondage d’opinion (IFOP) 37% des salariés sont concernés par cette démission silencieuse touchant, semble-t-il, surtout les cadres déçus. Et en effet, les témoignages exprimés sur les réseaux sociaux montrent que ce désengagement survient souvent après une phase de fort investissement du salarié dans son travail (en temps, en énergie) frisant même le burnout… pour ne trouver à la fin ni reconnaissance ni remerciement de son supérieur, et/ou même un refus d’augmentation de salaire.
Aux États-Unis, une recherche effectuée en septembre 2022 par Microsoft, a mis en évidence un grand décalage: 87% des employés estiment être performants, alors que pour les managers seuls 12% le sont. L’étude conclut par ailleurs que les managers n’ont pas conscience du réel engagement de certains employés dans leur travail – et que les employés, eux, ne réalisent pas que leur satisfaction au travail est en fait recherchée par un grand nombre d’employeurs… car elle est «rentable»!
Cette incompréhension mutuelle illustre donc un sérieux problème de management: cadres non formés à comprendre et à gérer les problèmes actuels car encore «formatés» selon des schémas obsolètes. La pression sur les employés s’intensifie ainsi toujours plus, pour qu’ils soient de plus en plus «performants», ce qui, ajouté au manque de personnel dans certains secteurs, provoque des situations de stress intenable débouchant sur la démission silencieuse.
Impact délétère sur la santé
Ce phénomène, même silencieux et donc peu visible, n’en est pas moins délétère tant pour les individus que pour les entreprises. La santé psychique se dégrade, avec dépression, épuisement, et toutes les conséquences sur les collègues, la famille, les amis, etc. Dans ce contexte, des chercheurs et des experts ont déjà prédit que l’augmentation continue des risques psychosociaux avec toujours plus de dégâts sur la santé des individus et des entreprises allait se poursuivre. Dans ce même article de l’Express, selon un sondage réalisé par le cabinet Empreintes Humaines du 20 au 30 juin 2022, 41% des salariés interrogés s’estimaient en détresse psychologique au travail, et 37% indiquaient souhaiter quitter leur entreprise.
Les conséquences pour les entreprises sont graves: augmentation de l’absentéisme, baisse des performances et de la qualité du travail, avec, inévitablement, un impact négatif sur la situation financière globale et sur l’image.
Le quiet quitting s’apparente à la «grande démission» en tant que désengagement, désenchantement des travailleurs. Mais il est en fait plus profond et plus grave, car il touche la valeur du travail, son sens, son importance dans la société, devenant une nouvelle forme de résistance à cette perte de valeurs, par un nouveau comportement face à cette désillusion… et son expression à travers les réseaux sociaux peut avoir un impact redoutable. D’où la nécessité d’alerter les décideurs et les chefs d’entreprise sur l’ampleur de cette épidémie et sur les moyens qui existent pour l’enrayer, à savoir une meilleure formation des managers et une amélioration de leur leadership. Car il s’agit bien d’un très sérieux problème qui ne peut plus rester «silencieux»!