On pourrait raisonnablement penser qu’une entreprise où la vitesse d’exécution des tâches est une priorité absolue, va engendrer du stress chez ses employés, avec ses conséquences: burnout, épuisement, dépression, absentéisme, etc.
Or, le magazine «L’Express» vient de publier un article sur le spécialiste de la livraison et de la logistique DHL. Eh bien, cette entreprise est réputée pour ses «bonnes» pratiques en ressources humaines… au point d’avoir reçu en 2024 le label «Top Employer Global» et d’être sacrée numéro un mondial au classement du label «Great Place to Work». Le taux de satisfaction globale de ses employés atteint 82% – ce qui est très supérieur à la moyenne du secteur.
Quels sont les secrets de cette entreprise au chiffre d’affaires de plus de 80 milliards d’euros et à la rentabilité économique exemplaire? Il ne s’agit pas d’holacratie, même si la stratégie de cette entreprise s’y apparente. Il y a d’abord une exigence de résultats qui ne nuit pas à la satisfaction au travail car elle est liée au respect des collaborateurs et à des valeurs et principes fondamentaux auxquels chacun adhère. La reconnaissance du travail accompli et les remerciements qui y sont associés participent à ce respect et à cette considération pour les employé(e)s. Chacun(e) se sent partie prenante du succès de l’entreprise, ce qui crée de façon naturelle une culture de solidarité et d’entraide dans l’ensemble de la communauté.
Ainsi, lors de périodes d’intenses activités (à Noël par ex.) le personnel de bureau (administration, finances, gestion) n’hésite pas à aller sur le terrain et à participer au conditionnement, à l’expédition et à la livraison des colis. «L’Express» a identifié deux facteurs importants favorisant ce climat: la proximité, qui se traduit par des briefings et des dialogues réguliers; et l’entraide dès qu’un besoin s’en fait sentir, par ex. lorsqu’un coursier n’arrivera pas à livrer ses colis à temps: l’équipe en cherche alors un autre dans les environs, pouvant se charger de la livraison de son collègue. Une autre stratégie RH vise aussi à renforcer cet esprit d’équipe par la création d’une formation innovante: Certified International Specialist (CIS) pour améliorer l’expertise professionnelle, diffuser les valeurs de l’entreprise et promouvoir l’engagement et la performance des équipes. Les différentes phases de cette formation sont attestées dans un petit livret, un «passeport» spécifique à l’entreprise.
Points-clés
Derrière ce tableau apparemment idyllique, que certains sociologues qualifieront de manipulation choquante et de conditionnement pervers des employés, à des fins uniquement économiques, il y a bien sûr la réalité et les difficultés habituelles inhérentes à ce type de travail, qu’elles soient d’origine logistique, humaine ou organisationnelle. Mais le DRH semble avoir bien identifié des points-clés essentiels: d’une part, ceux qui permettent aux collaborateurs d’être conscients de l’importance de leur tâche; et d’autre part, ceux liés à la rapidité de leur travail qui ne peut se réaliser au mieux, sur le moyen et long terme, que si le leadership et les conditions de travail sont adéquates.
Et donc, les faits et les résultats sont là: il s’agit bien d’une entreprise «où il fait bon travailler» et les ingrédients de son succès sont, à mon sens, un mélange de stratégie RH bien rôdée et une culture d’entreprise qui se base sur des valeurs qui donnent du sens au travail (respect, dignité, altruisme, etc.) constituant une réponse aux nouvelles aspirations des jeunes générations. Tout cela bien sûr à des fins de performances économiques (survie de l’entreprise) et de compétitivité sur un marché très convoité…. mais où finalement tout le monde y gagne.