La fin du divertissement?

La crise sanitaire actuelle montre déjà de rudes répercussions économiques: l’aéronautique, le tourisme, privé ou d’affaire, estival ou hivernal, balnéaire distant ou exotique extrême, les croisiéristes comme les chantiers navals, toutes les activités ludiques, sportives ou culturelles de masse, du Jazz-Festival de Montréal aux Jeux Olympiques de Tokyo, en passant par tous les parcs d’attractions de la Terre, mettront probablement des années à se remettre du coup d’arrêt brutal de toutes leurs activités. Imposé pour stopper l’expansion pandémique d’un méchant virus, le coût social de leur «réadaptation économique» sera absolument prohibitif, pendant plusieurs années, initiant une pandémie de licenciements.

Nous nous étions inventé, par distraction, un monde d’interdépendances globales ultra-complexes – mais sans assez de solides solidarités – aifn de satisfaire nos insatiables appétits. Acheter des pommes importées de Nouvelle-Zélande dans un supermarché de la Côte lémanique, c’est-à-dire au milieu de ses splendides vergers, relève d’un pur non-sens. Sauter dans un avion pour y demeurer 12 heures, à l’étroit comme dans une stabulation, afin de s’évader de l’hiver pendant une courte semaine, sur des plages de sables blancs, au bord d’une mer d’azur et sous un ciel immense, ne procédait-il pas d’une telle insatiabilité?

J’ai pu l’observer pour moi-même: à mesure des rythmes effrénés que je m’imposais au travail, une même frénésie me saisissais, symétrique et d’égale intensité, de me divertir. A moi donc les îles paradisiaques, noyées de soleil, pendant que souffle une bise glacée entre Alpes et Jura. Ou l’exploration de lointains déserts brûlants, pendant que l’Europe grelotte.

Le confinement global aura peut-être, néanmoins, une heureuse conséquence: une grande simplifcation des interactions laborieuses, l’inutilité de nos «divertissements professionnels» ayant été révélée. Certains voyages d’affaires, colloques professionnels ou séminaires, se sont vus remplacés par des vidéoconférences performantes. D’interminables séances, où quelques-uns s’épanchaient longuement, se réduisirent à 20 minutes utiles. Le temps perdu dans les trajets, aux heures de saturation des routes et des transports publics, fut retrouvé. Certaines intrusions récurrentes, à base de délégation ascendante (demander l’approbation et/ou la validation de son manager, pour chaque insignifante décision) disparurent, cédant la place à une brève information, a posteriori. Des outils de contrôle se révélèrent inutiles, inconsistants et contreproductifs, initiant ainsi une désadministration réelle. Le travail collaboratif, asynchrone et distant, se montra pareillement productif, en même temps que très économe en temps et en argent.

Le paradoxe ne manque pas d’humour: c’est sous la contrainte que nous avons découvert et expérimenté de nouvelles formes d’efficience au travail, plus libres, plus simples, plus agiles, plus collaboratives, plus économes, plus écologiques, plus efficaces, plus élégantes… De même aussi que la richesse essentielle de nos indispensables relations humaines.

A nous de veiller désormais à en conserver et à en développer le bénéfice!

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