Un collaborateur doit-il forcément râler pour se faire entendre?

En lisant récemment un article au titre évocateur (Why it pays to be a jerk), je me suis demandé si, à l’inverse, cela payait d’être gentil ou simplement confiant dans la capacité de sa hiérarchie à être équitable.

Nous savons que nous avons dans nos entreprises des collaborateurs râleurs et perpétuellement insatisfaits de leur salaire, que nous gardons malgré leurs jérémiades et coups de gueule car certains ont des compétences-clés. Leurs managers, qui connaissent leurs points forts, mettent beaucoup d’énergie pour les gérer et les contenter.

En parallèle, les compétents silencieux, eux, sont généralement aidants et plutôt conciliants, plus centrés sur le plaisir que sur l’argent. Ils sont moins chronophages et comme tout roule pour eux, le manager a tendance à moins s’en préoccuper. Ce sont finalement ceux à qui il demande toujours plus d’adaptabilité, de travail, d’engagement et dont il finit invariablement par abuser.

Managers, que se passe-t-il lorsque vous partez du principe qu’il faut forcément demander ou revendiquer pour recevoir?

Vous délaissez nécessairement les «donneurs spontanés», qui progressivement se mettent à se sentir injustement traités. A l’heure de la prise de conscience, ayant acquis une bonne réputation étonnamment plus à l’externe qu’à l’interne, ils acceptent finalement les sollicitations d’autres entreprises.

Quelques mois après la démission de votre fidèle élément, vous pourrez vous entendre dire sidéré «pourquoi ne m’a-t-il rien dit?». Il pensait que vous saviez tout ce qu’il faisait et qu’en avançant en confiance, vous finiriez par être juste et que vous vous rendriez compte de son travail. De votre côté, vous avez trouvé la situation confortable. L’entreprise a trop facilement tendance à estimer l’investissement de certains normal, gratuit.

Que devriez-vous faire pour éviter ce gâchis? D’abord, être conscient que les personnes que vous encadrez sont différentes par essence, et n’expriment donc pas les choses de la même manière. Ensuite, percevoir les signaux faibles. Voir un collaborateur devenir moins investi, presque imperceptiblement, moins participatif en réunion, avoir tout à coup quelques absences, le voir dire non pour la première fois et finalement, entendre un jour un ami vous dire qu’il a reçu récemment son CV. Enfin, soyez équitable en toutes choses, du salaire aux avantages, en passant par vos évaluations sur le travail.

Préoccupez-vous davantage de ceux qui ont des résultats plutôt que de ceux qui parlent de leurs résultats.

Récemment, une collaboratrice que j’ai auditée m’a raconté une histoire amusante: un de ses anciens responsables, lors d’une conversation dans laquelle elle lui exprimait le sentiment d’iniquité qu’elle ressentait depuis quelques années, lui a répondu tout naturellement : «il aurait fallu crier plus fort».

Je me demande aujourd’hui finalement si la plus grande préoccupation de ce responsable, à l’époque, n’aurait pas dû être de voir la passion et l’engagement de cette collaboratrice salariée depuis 12 ans se transformer en grand silence les quelques mois qui ont précédé sa démission. Cela lui aurait probablement évité les trois recrutements ratés qui l’ont suivie.

McClure

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