Le bore-out, une imposture?

Sans doute en est-il ainsi de toute découverte: elle suscite une surabondance d’interprétations ou d’extrapolations, immédiatement médiatisées.

Celle de la profonde et réelle détresse, née de la souffrance psychique au travail, est toute récente, devenue d’autant plus visible que la pénibilité physique du labeur salarié tend à disparaître des entreprises occidentales.

Contextualisons. La révolution industrielle, intégrant toute création de valeur ajoutée pour la concentrer au bénéfice de quelques-uns, fut souvent hélas une fournaise dévorant ses ouvriers corps et âmes et la pénibilité physique masquait toute autre détresse.

Cette vieille révolution s’éteint peu à peu et des automates numériques ou digitalisés nous épargnent dorénavant les tâches ingrates ou épuisantes. Paradoxalement, c’est alors que des formes de souffrances au travail jusqu’alors ignorées émergent.

Elles détruisent le profit comme les personnes: des accidents psychiques variés, au nombre desquels on peut compter les névroses d’angoisses, les troubles du comportement, la dépression nerveuse ainsi que les 3 formes de ce qu’on appelle génériquement le burn-out (dont surmenage, stress, conflits, absentéismes – ou présentéisme de sabotage- et démissions sont souvent le prélude).

J’ai déjà décrit la première de ces formes, la plus simple, la plus fréquente et la plus aisément curable (avec un accompagnement approprié, sans camisole chimique ni rejet dans la sphère privée). Il s’agit de l’épuisement psychique professionnel.

Découvert dans les années 70 aux USA, son nom illustre l’incendie intérieur détruisant les ressorts psychiques d’un travailleur. Seuls les plus motivés et les plus contributifs au sein d’une organisation en sont menacés: je n’ai jamais vu un dilettante ou un paresseux en être atteint.

Ses symptômes sont quasiment identiques à ceux d’une dépression. Mais à l’inverse de celle-ci, un burn-out est prévisible, rémissible et essentiellement d’origine professionnelle (même s’il embrase parfois toute la vie de sa victime).

Les 2 autres accidents psychiques sont plus complexes: ils peuvent se combiner au premier et en partager les symptômes. Le syndrome d’imposture, dont de nombreux managers ou dirigeants souffrent, est le second.

Persuadés de ne pas mériter leurs succès – ils en ont beaucoup, car eux aussi travaillent intensément -, ils s’enferment peu à peu dans la terreur – le mot n’est pas trop fort – de voir un jour dénoncée leur imposture (fictive, puisque née d’une perception erronée d’eux-mêmes, toute négative).

Repliée dans l’inconscient, cette détresse indicible est réelle et extrêmement douloureuse. Elle épuise toute énergie psychique et peut mener sa victime au burn-out, à la dépression, voire au suicide.

Imprévisible, mais très violent, le bore-out est la troisième forme. Une traduction littérale et des publications un peu trop hâtives ont hélas édulcoré le sens de ce mot, qui ne désigne pas l’ennui professionnel – notion bien étrangère à la vérité du monde du travail productif – mais l’écoeurement professionnel.

D’essence psychique, il se révèle en une ou plusieurs crises aigües et ses symptômes sont d’abord physiques: nausées, vertiges, chutes, vomissements, syncopes. Puis psychiques, comme pour les 2 autres: insomnies, déconcentration sévère, crises d’angoisse, irritabilité, impatience, cynisme, tétanie, déréliction, dépersonnalisation, pulsions suicidaires, etc.

Le bore-out menace toute personne travaillant longuement dans une contrainte aussi puissante qu’inconsciente: une étudiante poursuivant ses études par la seule volonté parentale, une consultante en marketing qui déteste le monde mercantile, un médecin, altruiste par principe, mais qui n’aime pas ses patients…

Tous, un jour laborieux ou un autre, nous pouvons ressentir les prémices de ces graves accidents psychiques. Des méthodes performantes existent pour s’en prémunir, pour les prévenir comme pour les guérir. N’est-il pas grand temps, pour tout dirigeant responsable, tout Directeur humain de nos primordiales Ressources, tout manager, de les implanter solidement et de créer ainsi, au bénéfice de tous, un authentique monde meilleur?

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